Vernissage de l’exposition Rose Béton
LA BIENNALE DU STREET ART A TOULOUSE
Toulouse : une plate-forme dédiée à l’art de la rue ?
Depuis de nombreuses années maintenant, la ville de Toulouse opère pour faire de la rue un terrain de jeux pour les artistes et un émerveillement pour les yeux des citadins. En effet, nous pouvons citer à titre d’exemple La Galerue et la Croix de Moretti , la fresque de Chambas ou encore les très connues œuvres du métro toulousain. C’est dans l’esprit d’un partenariat, d’un serrage de main chaleureux entre « art » et « ville » que Rose Béton entre dans l’enceinte des murs de Toulouse.
Un rendez-vous majeur du street art : Rose Béton
Le festival Rose Béton en est aujourd’hui à sa troisième édition qui a commencé début avril et qui se poursuivra jusqu’au 5 janvier 2020.
Dans la continuité de l’historique fresque de l’édition 2016, le festival s’inscrit à ciel ouvert dans la ville rose de Toulouse faisant appel à des artistes nationaux et internationaux. La biennale d’art contemporain et urbain s’est imposée comme un rendez-vous majeur du street art puisque la manifestation offre des lieux d’expression à investir afin de (re)découvrir des lieux emblématiques de Toulouse sublimés par les pratiques et cultures urbaines.
Des artistes mis en avant
Pour cette édition, Rose Béton a invité 10 artistes dont la plupart ne se situe pas sur le sol européen dans le but de créer une dynamique qui dépasse les frontières et les cultures.
Voici le portrait succinct de ces personnes qui font de Toulouse un laboratoire autant qu’une plateforme de création artistique !
JEROEN EROSIE Né en 1976 en Hollande Intervient dans la rue dès 1993 Diplômé de l’académie Willem de Kooning à Rotterdam Travaux dans l'illustration et la typographie A l'issue d'un développement d'un langage visuel abstrait
MOMO Né en 1974 aux Etats-Unis Intervention dans la rue à la fin des années 90 Plus grand tag au monde réalisé à New York Vision expérimentale Influencé par l'art abstrait
HENSE Né en 1978 aux Etats-Unis En contact avec l'art et l’esthétique dès l'enfance Sa carrière commence sur les murs de sa ville natale Atlanta Travail de superposition de formes, couleurs, éléments non-figuratifs Dialogue important entre oeuvre et environnement
MOSES & TAPS Lieu de provenance : Hambourg Rencontre en 2007 de MOSES et de TAPS Forment peu après le collectif TOP SPRAYER ™ En 2011 publication du livre International Topsprayer Investissent le droit pour les graffeurs
MARK JENKINS Né en 1970 aux Etats-Unis Crée principalement des installations Joue sur la frontière réel/iréel Technique naturaliste : envelopper un modèle vivant dans du film plastique puis le couvrir de ruban adhésif pour l'y faire sortir Son art est avant tout une « expérience sociale »
MADEMOISELLE KAT Né à Toulouse et études à l'UT2J Pionnière de l'art urbain dans les années 90 Joue des clichés et stéréotypes liés à la publicité et la communication autour de l'image de la femme Dimension onirique et sujets polémiques
RERO Né en 1983 en France Pratique dans des lieux laissés à l'abandon Réalise des installations étonnantes Fresques dont les lettres en capitale sont systématiquement rayées Explore la curiosité qui pousse à lire les mots censurés Frontière art conceptuel/art urbain brouillée
Les Abattoirs : lieu de médiation du street art
Du 27 septembre au 05 janvier : le musée des Abattoirs accueille 3 artistes internationaux du street art :
Tania Mouraud, Cleon Peterson et Todd James
Le vernissage : 26 septembre à 18h30
A l’occasion du vernissage, une visite privée avec Jean-Luc Moudenc, le maire de Toulouse initia l’événement. Les potes ne furent ouvertes au public seulement qu’à partir de 18h30.
Une première pour les Abattoirs !
Le vernissage n’attendait pas moins de 3 000 personnes sur place.
A cet effet, l’espace extérieur fut aménagé de façon conviviale sur fond de musique hip-hop pour marquer l’esprit graffiti et la culture underground importées directement des Etats-Unis ! Dans ce cadre, une collaboration fut établie avec une brasserie locale qui offrait des boissons dérivées au nom de « Rose béton » pour l’achat d’un gobelet au même nom.
Une ambiance festive en somme !
Les portes ouvrirent au public et c’est pas moins de plusieurs milliers de personnes qui se précipitaient pour retirer son ticket d’entrée gratuit pour cette occasion. De quoi prévenir l’accessibilité en concordance avec l’esprit de l’exposition !
Pendant 20 minutes, le public eut le droit de s’interroger pour la toute première fois sur les œuvres exposées.
C’est à l’issue de ces quelques minutes d’aperçus que les interventions commencèrent. La première prise parole est celle d’Anabelle Ténèze, la directrice actuelle du Musée des Abattoirs depuis 2016, qui introduit le Festival Rose Béton. S’ensuit Tilt, le créateur de la biennale qui donne la parole à la marraine de l’édition : Tania Mouraud, une des artistes exposés. Pour finir, la parole revient au maire qui vante l’engouement dû à l’accueil de ce type d’art dans la ville.
Sur ces derniers mots, le public applaudît et alla contempler les nombreuses œuvres du sous-sol du musée.
Les artistes sont restés jusqu’aux alentours de 20h, se montrant tout à fait accessibles au public et ouverts aux questions. Il y avait une dimension agréable des interactions. Des médiations furent aussi proposées par l’association Contrast qui est un groupe de 6 personnes présentes pour renseigner en complément des artistes, notamment sur l’histoire de l’art. Plus de 3000 personnes étaient attendues pour l’événement, presque autant d’entrées, et ce fut la première fois que la biennale investit les murs du musée.
La suite s’annonce fructueuse!
? TANIA MOURAUD
Tania Mouraud qui se trouve être désignée comme la marraine de la biennale, pratique le street art depuis la fin des années 1960 par différents moyens de médiation que sont la peinture, la performance, la vidéo et l’installation. Elle expose dans l’une des plus grandes salles des Abattoirs sont oeuvre Variations qui est en fait sept kakémonos de sa série Mots-Mêlés, accompagnés d’une peinture murale. Ce qui est caractéristique dans son art est son style calligraphique qui sont des « lettres et code barre, design graphique et réflexion citoyenne sur l’espace public ». Les œuvres sont accompagnées d’un diaporama présentant des photographies d’archives qui mettent en évidence le lien souhaité entre le musée et la rue.
diaporama de photographies d’archives met en évidence le lien qu’établit l’artiste entre le musée et son travail de rue. Par delà ses œuvres, Tania Mouraud semble vouloir interroger les choix esthétiques et sociétaux.
? TODD JAMES
Todd James envahit la dernière salle avec ses peintures. Il s’inspire de la culture pop ou de l’Action Painting, pour des peintures issues du graffiti traditionnel qui se veut illégal et qui se pratique en extérieur.
Ses toiles parlent souvent de sujets dits tabous et polémiques comme le sexe, la guerre et la domination masculine. Il conçoit aussi des oeuvres à caractère humoristique comme des personnages féminins disproportionnés ou encore des anus d’animaux.
Todd James participe également aux mondes de la mode et de la musique. Il a notamment conçu des couvertures d’albums et des logos pour les Beastie Boys, Eminem ou Iggy Pop. Ses influences viennent de son quartier de New York, de la génération de Style Wars (un des premiers documentaire sur le graffiti new yorkais) mais aussi des cartoons. Plus jeune, il graffait sous le nom de REAS dont sa zone de prédilection est le métro new yorkais. C’est un artiste autodidacte qui mélange pop et ce qu’il voit dans les rues de la ville.
? CLEON PETERSON
Cleon Peterson est issu d’un milieu marginal. Asthmatique, il a commencé à dessiner enfant lors de ses nombreuses hospitalisations. Après avoir passé plusieurs années de sa vie dans la rue où il a été témoin de violence, il décide de quitter sa vie natale pour s’installer à New York et rencontrer de nombreuses personnes qui l’inspireront comme Shepard Fairey.
L’oeuvre qu’est la fresque monumentale et dystopique de Cleon Peterson exposée aux Abattoirs résulte d’un mélange de récits mythologiques, de faits historiques et de la réalité actuelle du monde mettant en scène des formes dures et froides pour créer un univers violent et chaotique.
Ses influences sont nombreuses: le peintre américain Leon Golub, le peintre Le Caravage ainsi que le peintre Francisco de Goya. Mais il est important de spécifier qu’il est aussi nourri du quotidien de la prison et de l’hôpital psychiatrique dont il a lui-même fait l’expérience.
Le street art à Toulouse : entre valorisation et censure
Si la ville de Toulouse tient à vanter le street art dans ses rues mais aussi dans un des plus réputés musée qu’est Les Abattoirs ; peut-être serait-il intéressant de se pencher sur la question du graffiti hors institution ?
En effet, la métropole toulousaine a sorti les grands moyens en créant une hotline se nommant allotoulouse dont l’onglet « tag » permet de s’organiser face à la délation. En effet, « La brigade contre les incivilités » (anciennement ambassadeurs d’espace public) sillonnent les rues munis de leurs outils pour photographier les inscriptions indésirables et envoyer sur place des groupes d’effaceurs, chacun spécialisés dans un domaine (peinture, sableuse, solvants). Au total, c’est plus d’une centaine de personnes qui sont mobilisées chaque jour entre les différents pôles qui divisent géographiquement le territoire de la métropole. En plus des missions quotidiennes, des procédures d’urgence ont été créés pour effacer en moins de 48h les messages allant à l’encontre de la politique actuelle, à la demande des habitant.es, des élu.es ou de la police. Des astreintes ont même été mises en place pendant les premiers temps du mouvement des Gilets jaunes pour effacer les graffitis instantanément après les manifestations. La mairie investit de la main d’oeuvre, du temps, du matériel et de l’argent dans cette guerre qui apparaît sans fin
Le vernissage du Festival Rose Béton apparaît alors comme █ Contrast █ -é.