Le flamenco au Prado : le réveil des toiles endormies

Lors de la journée Internationale du tourisme le 27 septembre 2020, des icônes des arts espagnols se sont réunies afin de faire vivre la culture en pleine pandémie. Un projet en collaboration entre l’ « Asociación de Tablaos Flamencos de Madrid » et le Musée National du Prado de Madrid.

Une représentation artistique au message alarmant et puissant : celle de sauver la culture.

À l’occasion de l’exposition du musée du Prado, le « Reencuentro » ( les retrouvailles), Antonio Najarro, directeur du ballet national espagnol, s’est chargé de la direction artistique. Il est aussi présent dans la performance artistique. Il a su au long de la représentation effectuer des mélanges audacieux. Que cela soit au niveau de la chorégraphie, des costumes, des genres ou encore des arts.

Un mariage intéressant entre les beaux-arts, la danse espagnole traditionnelle et la musique flamenco.

Le spectacle est disponible sur les différents espaces numériques du musée, ainsi que sur Youtube, à travers une vidéo s’intitulant « le musée du Prado et le Flamenco ». Il n’y a pas de public réel pour admirer les performances des artistes. La vidéo a une durée totale de 4 minutes 27. Elle délivre un message pour le sauvetage de la culture.

« Pour la défense de la culture comme outil pour dépasser les frontières ».

La captation intégrale sur la chaine officielle du musée du Prado.

Une phrase éloquente aux diverses interprétations. Alors que le monde est frappé par une pandémie, les frontières physiques entre Etats sont compliquées. La découverte est difficile. Ainsi, la culture peut être un lien entre les citoyens. Un lien pouvant prendre plusieurs aspects mais se devant de perdurer. Comme dans le cas échéant le numérique peut servir à créer des liens entre tous au-delà des frontières.
Un autre point de vue sur cette phrase est à propos du mélange des arts et des styles dans la collaboration entre le Musée du Prado et l’association de Flamenco. La culture ne doit pas être enfermée et étriquée à un univers et à ses codes. Il peut se réinventer pour apporter un nouveau point de vue ou encore une sensibilité différente. Un art ne peut pas se cantonner à des frontières pouvant paraître archaïques. 

La totalité de la performance est filmée. Une captation visuelle qui remplace la présence de public. La vidéo propose une vision différente de celle qu’aurait pu avoir le spectateur. Il est guidé par les différentes fluctuations de la vidéo. Cela a permis de se concentrer sur des éléments particuliers. La vidéo met en avant tous les aspects de la représentation. 

Elle n’est pas linéaire, elle joue avec le lieu, les costumes, les mouvements et les expressions des danseurs.

Les plans larges aident à avoir une triple contemplation. On admire les œuvres accrochées aux murs et en même temps les danseurs. Lors de ces plans, le danseur effectue sa chorégraphie devant la figure qu’il représente. L’idée de performance est liée à toutes les composantes artistiques. Le lieu et les œuvres appuient les mouvements traditionnels espagnols.
Tandis que les plans cintrés cherchent à accentuer et provoquer des émotions chez le spectateur.

Tous les danseurs sont une oeuvre. 
Ils seront énumérés selon leur ordre d'apparition au début de la vidéo.
- Manuel Liñan "L’Immaculée conception" de Esteban Murillo. 
- La danseuse Cristina Cazorla sera "La reine Marianne d’Autriche" de Diego Velazquez.
- Jesus Carmona interprétant "La descente de la croix" de Van Der Weyden 
- Eduardo Guerrero rend hommage à Rubens avec son œuvre "Saint Georges et le dragon".
- Antonio Najarro qui lui représente un ange dans "L’annonciation" de El Greco.
- Olga Pericet "Saturne dévorant un de ses fils" de Francisco de Goya.

Les danseurs rentrent dans la peau du personnage peint grâce à l’occupation de l’espace muséale, des constumes, des mouvements précis en fonction de chaque caractère.
Des sentiments divers comme la douceur pour Cristina Cazorla, la souffrance pour Jesus Carmona ou encore le sentiment de domination pour Eduardo Guerrero.

Cette mise en scène propose une médiation par les danseurs. Ce sont eux qui vont exercer le lien entre le public et les oeuvres. Une médiation particulière, car elle sera personnifiée. Par la mise en scène et la narration qui suivent le fil rouge de l’interprétations des oeuvres peintes.

Un mélange possible grâce à la formation polyvalente du directeur artistique ( danse espagnole, patinage artistique) et son rôle de directeur du ballet national d’Espagne. Cela lui a permis d’assembler et fusionner plusieurs champs des arts. Une composition en art vivant à la pointe du classique en passant par les mouvements romantique du flamenco sans oublier la légèreté du boléro. Antonio Najarro a su coupler spectacle vivant et Beaux-Arts dans l’objectif de diffuser un message d’ouverture et d’espoir.

Ce spectacle vivant fait renaître les tableaux et le musée en les dynamisant par le chant comme la danse.

Antonia Velay