La Revue des Spectateurs Art&Com

Médiations et publics | n°3 – Edition 2021-2022

Non classé

Cirque et saltimbanques : à Rouen, une exposition sous le signe du spectacle

Malheureusement, le musée n’autorise pas les photos sur cette exposition.

Pour la 9e édition du Temps des Collections, intitulée « Cirque et saltimbanques », le musée des Beaux-Arts de Rouen accueille jusqu’au 17 avril 2022, un fonds exceptionnel, la collection J.Y. et G. Borg, une des plus importantes collections privées sur le thème du cirque ainsi que de prestigieux prêts de grandes institutions !

            À travers cette exposition mettant à l’honneur peintures, dessins, affiches, objets d’art, costumes, jouets, sculptures ou photographies du monde circassien, nous pouvons aisément retracer l’histoire de cet art. Afin de découvrir pourquoi le cirque inspire, depuis son origine, les peintres, les plasticiens et les photographes, il suffira tout simplement de s’engouffrer par l’entrée située au milieu du jardin des sculptures, représentant très clairement l’entrée d’un chapiteau. Nous arrivons alors dans une ambiance tamisée, ou les salles se différencie par les couleurs vives du cirque (rouge, jaune, bleu…). Tout est fait pour que l’on fasse partie dans l’exposition, comme un spectateur ferait partie du spectacle. Nous n’avons aucun contact avec le monde extérieur (pas de fenêtre par exemple), et parfois, les rideaux rouges de spectacle entre chaque salle, nous donnent l’illusion de passer d’un chapiteau à un autre.

Marion Roullé ©

            L’exposition se compose de 7 parties, portant sur les liens intimes du cirque avec le monde de l’art et les artistes. La visite commence par la salle des affiches promotionnelles, éléments importants dans le développement du cirque puisque grâce à elles, il y eut l’apparition de grandes troupes itinérantes. L’esthétique joyeuse et bigarrée de ces réclames, qui façonne encore aujourd’hui l’imaginaire du cirque, se retrouve immanquablement dans la mise en scène. Ensuite, c’est au tour des saltimbanques et des batteurs de prendre place. Ce monde en marge a captivé les artistes dès l’époque romantique : ils y ont vu comme un reflet de leur propre condition, faite d’indépendance et de prestige éphémère, mais aussi de solidarité. Afin de retracer au mieux l’historique du cirque, il était nécessaire de parler des grandes traditions du spectacle équestre puisqu’à l’origine, le cirque en était un. La collection, à travers les dessins et les peintures, permet de comprendre que le voltige et les exercices de dressage ont donné lieu à une démocratisation de l’art équestre, autrefois réservé majoritairement aux aristocrates.

Dans une autre salle, les photographies, judicieusement placées par époques, nous amènent à imaginer l’évolution architecturale des bâtiments circassiens. Ils sont d’abord dans des lieux fixes tels que des théâtres, puis choisissent des endroits aux formes circulaires. C’est ainsi que naîtra le cirque d’itinérance, avec la présence de chapiteaux dont la salle suivante s’inspire. Ici, le parti pris scénographique est de donner l’illusion aux visiteurs de se situer sur la piste, par le biais de décors de spectacle et d’animaux en bois, mais également par la fameuse forme circulaire. Ceci est destiné à mettre en avant l’image singulière de la relation homme/animal sauvage salon l’autorité et la contrainte, mais aussi de l’espace d’échange et de complicité. Aujourd’hui bien sûr, cela est remis en cause par rapport au bien-être de l’animal et le cirque tente de se réinventer sous de formes nouvelles.

Cette déambulation se terminera donc par la modernité du cirque, où nous sommes enchantés par les costumes exposés des ancêtres des clowns, appelés « clowns blancs ». Apparu pendant le cirque équestre, ils empruntent des caractères au personnage du bouffon dans la comedia del arte. Une vidéo du célèbre clown Grock, issue de la chaîne de télévision Ina, permet de conclure cette visite comme si l’on était vraiment venue voir un spectacle au cirque. Bien évidemment, la sortie se fera comme pour l’entrée : à travers des portes de chapiteaux représentaient par les grands rideaux rouges.

Une des affiches de l’exposition « Cirque et saltimbanques », représentant un des anciens costumes de clowns

Je vous recommande vivement d’aller voir Cirque et saltimbanques ! Le temps de visite n’excède pas une heure, et est pour autant, très riche. Chaque thématique abordée nous apporte ce qu’il faut comme élément pour comprendre, et elles se succèdent parfaitement. De plus, on pourrait penser que le thème général serait plus en destination des enfants, mais le côté historique interpelle les plus grands et les objets de collections séduits tous les âges. Je me suis même laissée essayer les animations en bois présentes dans chaque salle, initialement prévues pour les enfants. Personnellement, la mise en scène m’a énormément plu et m’a permis une immersion complète dans l’univers du cirque, oubliant le temps d’un moment que je suis au musée des Beaux-Arts.