Le mystère Physiopolis
L’Ile de Platais constitue l’un des nombreux îlots qui flottent sur la Seine. Bloqué entre Médan et Villennes-sur-Seine, le morceau de terre héberge encore quelques habitants, un parc aquatique délaissé et l’âme de Physiopolis : une colonie naturiste et hygiéniste fondée par les frères Durville.
« Navette dans 2 minutes » prévient doucement l’une des « passeuses » de l’Ile. Chargés de paquets de riz, ordinateurs, poireaux et autres éléments indispensables pour un confinement réussi, nous attendons le navire qui bientôt arrive et nous dépose de l’autre côté de la rive. Nous y passerons un mois : le temps de découvrir l’histoire particulière du lieu.
Physiopolis ( alias la cité de la nature ) a été fondée dans les années 30 par André et Gaston Durville. Il s’agissait pour eux de bâtir le premier domaine naturiste de France et de mettre en place leur doctrine. Ils voulaient que les français acquièrent une « santé durable » et deviennent « une race forte » grâce à des cures multiples se traduisant par une alimentation saine, des bains de soleil, un retour à la terre et beaucoup, beaucoup, beaucoup de sport. Leur colonie n’a pas duré longtemps et dans les années 50 l’île est devenue un simple camp de vacances.
Aujourd’hui, les naturistes ont déserté l’île mais des physiopolitains y vivent toujours. L’île est parsemée de bungalows en fibrociments et de chalets que des particuliers achètent pour les rénover et en faire leur habitation primaire ou secondaire. Certains infrastructures n’ont pas bougé et participent de l’ambiance particulière du lieu.
En 1935, « La piscine » ouvre ses portes et accueille les parisiens pour leurs trempettes estivales. Aujourd’hui à l’abandon, le bâtiment ( et ses faux airs de temple art-déco ) accueille les férus d’urbex. Depuis des années la piscine est au cœur de nombreux projets remis en cause par les habitants de l’île et par le Plan de prévention de risques d’Inondation ( PPRI ) qui interdit toute construction. Le classement d’une partie des bâtiment au Patrimoine historique n’arrange pas les affaires des promoteurs immobiliers.
Il y a 5 ans, le lieu a été investi par le collectif Mainstenant qui souhaitait faire de cet endroit un éco-lieu avec une boulangerie, des potagers, une grainothèque et des activités pour sensibiliser les enfants à l’environnement. L’arrivée, un peu forcée, de ces « écolos » n’a pas été vu d’un bon œil par les habitants qui les ont gentiment mis à la porte.
Pendant un mois, nous avons fouillé les recoins de ce monceau de terre, emprunté l’avenue des (champs) Élysées et observé avec attention l’héritage des années Durville. Pendant un mois, nous avons approché de près les vestiges d’un patrimoine historique et privé très peu connu.
Pour pouvoir accéder à Physiopolis, il faut posséder un lopin de terre, connaître quelqu’un qui qui en possède un ou construire un radeau plus solide que celui de la Méduse pour rejoindre l’autre rive. A cause de cela, ce patrimoine flottant reste un mystère pour beaucoup de franciliens.