Beaux Arts à Carcassonne : détapissons l’ancien !
Les confinements n’auront finalement pas eu qu’un impact négatif sur les visages de nos musées. De fil en aiguille, certaines de ces institutions ont effectivement profité de cette période de fermeture forcée pour effectuer quelques travaux. Le musée des Beaux Arts de Carcassonne n’y fait pas exception. Allons donc voir ce qu’il s’y trame…
Une remise à neuf et une exposition moderne
J’avais déjà eu l’occasion de visiter ce musée quand j’étais plus jeune, la dernière fois à 12 ans. Aujourd’hui, 10 ans plus tard, je (re)découvre la bâtisse et sa collection. Celle-ci se compose de différentes œuvres, principalement des tableaux, qui s’étendent sur une vaste période, du XVIe siècle jusqu’au XXe siècle. Répartie en 10 salles, le musée possède également une salle permettant une exposition temporaire. En ce moment, et ce jusqu’au 19 mars, il s’agit de l’exposition Tapisser!e – 1940-1970, mettant à l’honneur des artistes tels que Miró, Delaunay, Le Corbusier, et beaucoup d’autres.
Dès l’entrée, nous sommes accueillis par deux employés souriants qui nous expliquent le fonctionnement du musée et le sens de visite. Le hall d’accueil dispose de casier privé où les visiteurs peuvent laisser leurs affaires, chose qui devient obligatoire dans le cas d’un sac à dos.
La toute première salle dans laquelle nous entrons, sur le XXe siècle après 1945, met la ville de Carcassonne et les artistes de la région à l’honneur. La scénographie est assez logique, faisant glisser la visite en partant d’œuvres centrée sur la ville et son patrimoine, avant de présenter les œuvres d’artistes régionaux. Bien que l’intention soit louable, la cassure entre les thèmes abordés par les artistes rend l’ensemble assez hétérogène, bien qu’il reste agréable à l’œil.
Contre l’un des murs de la salle, une large tablette numérique a attiré mon attention. Peut-être y trouverais-je des renseignements sur ces artistes. Contre toute attente, il s’agissait d’un recueil de poèmes inédits, écrits à la main et accompagnés d’illustration dans un journal numérisé.
L’initiative, bien qu’appréciable, est quelque peu gâchée par le fonctionnement et la disposition de la tablette. Celle-ci est effectivement trop haute pour être lue par des enfants, ou des personnes en fauteuils roulants, et elle n’est pas mobile. le fonctionnement laisse également à désirer : bien qu’assez simple pour les personnes ayant l’habitude de la technologie, celles qui l’utilisent moins ont plus de mal. Il est également possible, suite à une mauvaise manipulation, de bloquer la tablette dans les paramètres et d’être obligé de demander de l’aide pour revenir au recueil numérisé. Le dernier exemple est arrivé à la personne qui m’accompagnait lors de cette visite.
Il est important tout de même de noter le travail de lumière qui a été considérablement amélioré depuis ma dernière visite (et en 10 ans, heureusement tout de même !). L’ensemble des œuvres est traité avec un ou plusieurs projecteurs dont la luminosité est adaptée, permettant un éclairage doux donnant une bonne visibilité et sans surexposer le tableau en créant des reflets blancs.
Globalement agréablement surprise de ce nouvel aménagement, j’attendais impatiemment la suite de la visite, ce début ayant placé la barre de mes attentes très haut.
Des améliorations mitigées
Avant même l’arrivée à l’étage, l’état des escaliers m’a serrée le cœur. Les murs crépis étaient lézardés de quelques fissures, et les couleurs, ternes, tranchaient radicalement avec l’élégant gris bleuté de la première salle et les teintes éclatantes des passes-têtes de la salle précédente. Cette dernière n’ayant pas une visée d’exposition, deux activités impliquant davantage les publics y ont été disposées : des passe-têtes aux décors inspirés du XVIIe siècle, et un photocall réalisé par un artiste toulousain.
L’initiative, bien qu’amusante, est malheureusement la seule impliquant les visiteurs, à l’exception de quelques cartels et de 3 feuilles A4 comportant des renseignements sur l’exposition permanente. Le musée n’emploie malheureusement pas de médiateur culturel. Les gardiens, seuls personnels présents dans les salles, sont plus ou moins bien renseigné quand aux œuvres et au artistes exposés, mais ils sont en revanche prompts à se renseigner en cas de question à laquelle ils ne peuvent pas répondre.
Les escaliers prennent enfin fin, et nous entrons dans la suite de l’exposition permanente. Comme dit plus tôt, les premières salles avant placées mes attentes assez hauts, et je fus donc très surprise en voyant que le soin apporté à l’éclairage n’était pas le même à tous les étages. Ici, quelques projecteurs, mais surtout des néons qui reflétait une ombre blanche sur les tableaux les plus hauts, les rendant parfois presque invisible.
En avançant parmi les tableaux, je pris conscience que la scénographie était sensiblement la même que cette que j’avais vu il y a 10 ans, impression qui m’a été confirmée par l’un des gardiens. A l’exception de la couleurs murs, de nouveaux cartels, et de stores ou de panneaux masquant les fenêtres, presque rien n’avait bougé. J’avoue avoir été plutôt déçue de ce constat, mais je me suis alors rappelée d’une chose : l’entrée de ce musée est gratuite, et tous ses financements proviennent de la ville. En faisant le choix, à l’instar des Britanniques, de garantir une entrée libre, le musée voit donc son budget considérablement restreint, et une rénovation complète n’était donc pas envisageable. D’autant plus que l’exposition temporaire, sur la tapisserie, est très intéressante. Pour un musée gratuit, le résultat est donc largement suffisant.
Un bilan encourageant
S’il est indéniable qu’il y a eu de sacrés améliorations en 10 ans (notamment le fait de ne plus éclairer les pièces par la lumière filtrant des fenêtres), il reste cela dit des choses à revoir. Parmi elles, en premier lieu, l’implication du visiteur sur le lieu. Il y a peu de cartel, et les fiches de visites indiquent peu d’informations (à l’exception des biographies d’André Chénier et de Jacques Gamelin). Cependant ce manque fut compensé par les gardiens que nous avons rencontrées ce jour-là, qui se sont révélées être très aimable et ont mis un point d’honneur à répondre à nos questions, même si ils ont dû, pour la plus part, aller demander l’information.
L’autre bémol quand au public est lié à la tablette, permettant la lecture du recueil de poème. Trop haute pour un enfant et pour une personne en fauteuil, elle se révèle également être peu intuitive d’utilisation, et il est très facile de la dérégler par accident. C’est cependant un détail, car il est important de noter la présence d’ascenseurs, qui permet ainsi l’accès aux personnes à mobilité réduite.
De plus, bien que l’on ne trouve pas d’activité directement dans l’établissement, il est possible de télécharger, sur le site de Carcassonne Agglo, quelques activités à réaliser avec les enfants, en plus d’une multitude de dossiers pédagogique. L’offre en ligne, complémentaire avec la visite, est assez simple d’utilisation et y ajoute une petite plus value.
Enfin, il est important de rappeler que c’est un musée à l’entrée gratuite, aussi, les efforts réalisés lors de cette rénovations sont donc extrêmement encourageant quand à la position de la ville vis à vis de la culture. Je souhaite de tout cœur que l’avenir continuera à aller dans ce sens. Nous verrons cela lors d’une prochaine visite, peut-être encore dans 10 ans !